L’arbre frêne
Le frêne est un arbre de haut jet qui peut atteindre 300 ans et grimper à 30 mètres. Son feuillage est caractéristique, composé de feuilles étroites en vis-à-vis, aléatoirement 11, 13, 15 ou 17 feuilles. Il est un des plus beaux ornements de nos campagnes, présent à toutes les latitudes tempérées.
Utilisation traditionnelle et qualités
Le frêne est le bois utilisé traditionnellement dans certains éléments de charronnerie et certains outillages : rayons de charrettes, brancards, manches d’outil, etc…, voire certaines armes comme les arcs. Et bien sûr dans de nombreux types de bâts d’autrefois. La raison en est simple : la souplesse du bois, qui résiste aux torsions grâce à ses fibres longues. Une autre qualité du frêne est sa résistance extrême à l’onde de choc provoquée par un contact brutal. Là où une pièce de hêtre va exploser en allumettes, le frêne vibrera à peine.
Caractéristiques du bois
Le frêne est un bois dur, surtout au cœur de l’arbre. Au point que pour visser une vis de Ø 4 mm il faut impérativement pré-percer au foret de 3.5 mm, sous peine de briser net la vis… Le bois offre une grande homogénéité, sans filaments venant polluer la surface. S’il donne quelquefois du contre-fil au moment du rabotage, celui-ci n’est guère profond et peut être facilement éliminé au ponçage. Après le dernier passage de finition, au grain de 240, on obtient une surface d’une grande douceur qui demeure stable dans le temps. Le frêne est très agréable à travailler, c’est un bois franc et massif qu’on guide facilement à l’outil. Il ne salit pas les lames, même s’il les use rapidement… Il présente parfois de magnifiques ondulations, connues sous le nom de frêne-olivier, mises en évidence par le ponçage fin.
Les tensions du frêne
Le frêne est un arbre dont le bois est traversé par de multiples tensions dues à ses fibres longues, un peu comme un muscle. Les bûcherons s’en méfient comme de la peste au moment de l’abattage, tant le tronc entier peut se comporter comme un arc en se fendant sur toute sa longueur. Même au moment du travail sur les petites pièces se révèlent parfois des tensions qui peuvent provoquer des fentes et des criques très rapidement, ou même plusieurs semaines plus tard, alors qu’on pensait la pièce stabilisée. Pratiquement 10% des pièces que nous travaillons finissent ainsi au feu… Par contre, une fois que la pièce a tenu trois mois, nous sommes alors certains qu’elle ne bougera plus jamais, à l’exception d’un léger « retrait », comme tous les bois.
Solidité
Chez Randoline, nous avons connu depuis 2009, date du début de production de nos bâts, une seule casse accidentelle d’une seule pièce de bât : le traversier d’un Bâlissandre qui n’a pas survécu à la chute de l’âne dans un ravin des Pyrénées catalanes. Heureusement l’âne s’en est sorti avec des griffures mais sans blessure. Nous avons expédié au randonneur par Colis urgent la pièce neuve et 48 heures plus tard il reprenait sa randonnée. Cette seule et unique casse, sur 1.300 bâts vendus entre 2009 et 2023, soit 15.600 pièces (puisqu’un bât se compose en moyenne de 12 pièces), montre la justesse de notre choix du frêne comme matériau de base de nos productions.
La loupe de frêne
Autre bonheur pour l’ébéniste : la loupe de frêne. Certains frênes sont taillés en « têtard », c’est-à-dire qu’on coupe toutes les branches chaque année au même endroit, ce qui engendre une série de cicatrices, au point de former une grosse boule après quelques décennies. Lorsque l’arbre est abattu, cette boule est découpée en fines lamelles pour donner une magnifique mosaïque de formes et de couleurs, utilisée en marqueterie.
La maladie du frêne
Le frêne est hélas est menacé par une maladie connue sous le nom de chalarose. C’est un champignon venu d’Asie, apparu en Pologne dans les années 1990 et qui attaque les populations de frêne chaque année un peu plus à l’ouest, nécrosant et tuant impitoyablement nos arbres, tout comme la graphiose a détruit les ormes dans les années 1970. Seuls 5% des arbres survivent, pour de mystérieuses raisons génétiques. Certaines variétés de frênes semblent être à l’abri du prédateur, ce qui permettra sans doute à l’espèce de survivre. Chez Randoline nous avons anticipé le phénomène en stockant une dizaine d’années de production.
Bois de chauffage
Seul bémol du frêne : aucune utilité en bois de chauffage, car il brûle très vite et ne donne pas de braise. Mais pour des petits feux de demi-saison, il peut rendre service car on peut le brûler l’année même de la coupe.
Nutrition
Grand bienfait pour les animaux : le frêne est une essence dont tous les animaux raffolent : bovins, caprins, ânes. Il contient sans doute un échantillonnage de vitamines et une saveur qu’ils apprécient. Voilà pourquoi dans les régions de moyenne montagne, comme la Margeride, tous les champs sont entourés de frênes. En août ou septembre, quand la sécheresse a jauni l’herbe, on coupe toutes les branches du frêne (qui sont de faible diamètre puisque cette coupe est effectuée chaque année) et on les jette dans la pâture. Les animaux dévorent quasiment tout : feuilles, écorce et bois… Certains éleveurs mettent aussi ces branches en fagots pour les donner aux bêtes pendant l’hiver